Un patrimoine vivant entre vignes et canaux

Dominant la plaine d’Alsace, cernée de vignes et baignée par la Lauch, Colmar surgit tel un décor peint, mais animé d’un rythme discret, où l’ordinaire croise l’exceptionnel. Traverser ses ruelles, c’est plonger dans une histoire dense : fondée au IX siècle, mentionnée dès 823, Colmar a su équilibrer son ancrage médiéval et sa vitalité contemporaine (Ville de Colmar).

Son centre historique est remarquable par la densité de ses bâtiments classés. Colmar compte pas moins de 50 monuments inscrits ou classés au titre des monuments historiques, le nombre le plus élevé dans la région après Strasbourg (DRAC Grand Est). Flâner dans la “Petite Venise”, longer les maisons à colombages, c’est comprendre la singularité d’une cité façonnée par le commerce du vin et l’histoire rhénane.

Une architecture signature, reflet d’un passé cosmopolite

Colmar concentre des styles architecturaux variés : gothique, renaissance rhénane, baroque ou néo-classique. La Maison Pfister, érigée en 1537 pour un chapelier enrichi, incarne le passage de la période médiévale à la Renaissance. Plus loin, la Maison des Têtes (1609), célèbre pour ses 111 visages sculptés, illustre l’opulence d’une bourgeoisie marchande passionnée d’art.

Colmar a abrité d’importantes minorités religieuses. L’ancienne synagogue (XIX siècle), le couvent des Dominicains et l’église Saint-Martin témoignent de la cohabitation, parfois tendue, des cultes catholique, protestant et juif. Cette diversité transparaît dans la conception des quartiers et dans les détails sculptés de façades.

Colmar, creuset culturel et ville-musée

Autrefois titrée “Ville de l’Art et de l’Histoire”, Colmar accueille aujourd’hui près de 900 000 visiteurs annuels (Colmar Tourisme). Son rayonnement culturel s’appuie sur des institutions solides :

  • Le Musée Unterlinden, où la visite du Retable d’Issenheim (Matthias Grünewald, XVI siècle) figure comme une étape majeure. Le musée, agrandi par Herzog & de Meuron, accueille aussi des œuvres de Picasso, Dubuffet, Monet… Chaque année, il attire plus de 200 000 visiteurs (Musée Unterlinden).
  • Le Musée Bartholdi, dédié à l’enfant du pays, créateur de la Statue de la Liberté à New York. Anecdote peu connue : Bartholdi a conçu, parmi d’autres œuvres colmariennes, la fontaine de la place des Six Montagnes Noires, surmontée d’une reproduction réduite de Lady Liberty.
  • Le Koïfhus, ancien entrepôt douanier du début du XVe siècle, qui joue aujourd’hui le rôle de centre d’exposition et d’espace de rencontres lors des marchés ou festivals.

Les festivals rythment la cité toute l’année : festival international du film en septembre, jazz en été, marché de Noël classé parmi les plus beaux d’Europe (Noël à Colmar). Colmar, ville de 70 000 habitants, réserve une qualité culturelle rare pour sa taille.

La “Petite Venise” au fil de l’eau

Dès le Moyen Âge, la Lauch servait à la fois de frontière, de voie d’approvisionnement et d’“égout naturel”. Aujourd’hui, la Petite Venise, quartier autrefois populaire, offre un décor singulier : les maisons tournent leurs balcons fleuris vers les berges, peintes dans une gamme tendre de bleus, de verts et d’ocre.

Une expérience appréciée reste la promenade en barque à fond plat, menée par des “bateliers” locaux qui commentent le paysage et relatent les anecdotes du quartier, longtemps habité par des poissonniers, maraîchers et tanneurs. Selon la saison, les berges se parent de lampions, d’illuminations ou d’installations artistiques éphémères, jusqu’à attirer chaque année plus de 150 000 visiteurs en flânerie.

La vigne, racines et fierté colmariennes

Colmar s’affirme capitale des vins d’Alsace. La ville abrite la station viticole de l’INRAe (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement), acteur clé de la sélection et de la préservation de cépages emblématiques : riesling, gewurztraminer, pinot gris…

  • Près de 900 hectares de vignes intra-muros ou à la périphérie de Colmar sont exploités, soit une densité impressionnante pour une ville de cette taille (CIVA).
  • Colmar est le point de départ ou d’arrivée officiel de la “Route des Vins d’Alsace”, itinéraire de 170 km jalonné de villages fleuris, de domaines et de winstubs.

La ville accueille aussi la Foire aux vins d’Alsace depuis 1948, événement mêlant dégustations, concerts et rencontres professionnelles. Près de 300 000 visiteurs participent chaque année à ces festivités, au point de la hisser parmi les plus grandes manifestations oenotouristiques de France (Foire aux Vins de Colmar).

Artisanat et savoir-faire local : l’âme de Colmar

La tradition artisanale reste très vivace : confiseries, faïences, verreries, tissus… Les marchés hebdomadaires (rue des Clefs, marché couvert) valorisent les produits régionaux. La maison “L’Oncle Hansi”, dédiée à l’illustrateur Jean-Jacques Waltz, perpétue la culture populaire alsacienne, à travers souvenirs, expositions, et contes pour enfants.

En décembre, le marché de Noël s’étend sur cinq places, mêle céramistes, confiseurs, viticulteurs, artistes… Il attire près d’1,3 million de visiteurs selon les chiffres des organisateurs (Noël Colmar). Ici, l’artisanat ne relève pas du folklore mais s’inscrit dans un tissu économique vivant : 140 commerces dits “typiques” sont recensés dans le centre (Ville de Colmar, chiffres du commerce).

Saveurs et gastronomie colmariennes : bien plus que la choucroute

Au-delà des clichés, Colmar réserve une véritable cartographie gourmande. Du winstub familial à la table étoilée (parmi lesquelles le JY’S, doublement étoilé Michelin), les saveurs d’ici sont mises à l’honneur.

  • Baeckeoffe de légumes anciens
  • Escargots de la plaine d’Alsace
  • Tarte flambée déclinée au munster fermier
  • Bouchées à la reine finement relevées au riesling

Colmar est classée “Ville européenne de la gastronomie” en 2023 par le Conseil Européen de la Confrérie de la Chaîne des Rôtisseurs, un label saluant la vitalité de son tissu de restaurateurs, la formation des jeunes chefs dans des écoles réputées et la densité de ses marchés de produits frais.

Colmar, ville-jardin, entre art urbain et nature domestiquée

Rares sont les villes qui offrent autant de respirations. Les berges de la Lauch ont été requalifiées en sentiers piétons et cyclables. Plus de 70 hectares d’espaces verts sont ouverts au public (Espaces verts Colmar). Le quartier du Champ-de-Mars et son jardin public, aménagé au XIX siècle, accueille des concerts, des expositions florales et des marchés ouverts. Les parcs rivalisent de roseraies et de vieux arbres “remarquables”.

Chaque été, Colmar opère une transformation florale : 5000 jardinières et bacs, 200 espèces de plantes, 30 000 m fleuris, classant la cité parmi les plus belles “villes fleuries” de France (label 4 fleurs, Villes et Villages Fleuris).

Secrets et expériences insolites : Colmar de l’intérieur

Au-delà des grands classiques, Colmar cultive des expériences méconnues, réservées aux curieux :

  • Visiter la cave gothique de l’Hôpital civil (1395), toujours en activité, où vieillissent des cuvées médicales historiques, dont la plus ancienne bouteille de vin du monde (millésime 1472) visible au public (Patrimoine Hospitaliers d’Alsace).
  • Explorer la cour du Musée du Jouet, installé dans une ancienne école, et découvrir plus de 15000 objets, trains miniatures, automates...
  • Chiner chez les brocanteurs et bouquinistes de la rue des Têtes, où circulent livres anciens, gravures, marionnettes et objets d’art populaire.
  • Se laisser porter par une nocturne animée : depuis 1997, le parcours “Colmar Lumière” met en valeur 37 sites et monuments par un jeu d’éclairage scénographié, invitant à l’errance urbaine.

Entre mémoire et hospitalité : une identité à part

Colmar échappe à la caricature de la ville-musée figée. Si elle fascine par ses façades, elle séduit d’abord par sa convivialité, la densité de ses associations et la vitalité de ses plateaux artistiques. L’influence de Bartholdi et de Hansi imprègne toujours la ville, tout comme celle des vignerons qui animent les foires et partagent une hospitalité singulière, ouverte mais ancrée dans la modestie propre à l’Alsace intérieure.

Colmar et ses alentours : une invitation à explorer

Le territoire de Colmar s’ouvre naturellement vers d’autres merveilles : Eguisheim (élu “Village préféré des Français” en 2013) est à 7 km, tandis que la forêt de la Hardt, les anciennes mines de Potasse ou le château du Hohlandsbourg offrent des haltes variées. Le réseau TER et les pistes cyclables permettent de rayonner aisément.

Colmar est une promesse d’Alsace intensément vécue, entre mémoire, expérience sensorielle et ouverture sur l’inattendu.

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